Agriculture française, vers une autonomie alimentaire ?
La crise sanitaire a replacé la souveraineté alimentaire de la France au cœur des enjeux. Alors que certains Français cherchaient à faire des réserves et d’autres à consommer toujours plus local, une question s’est posée : l’agriculture française peut-elle suffire à nourrir le pays ? Pour les consommateurs, pour les agriculteurs, pour les politiques, l’autonomie alimentaire est nécessitée. Mais alors, est-ce possible ?
Vers une autonomie alimentaire
« Il nous faudra rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française ». C’est ce qu’avait annoncé Emmanuel Macron le 13 avril 2020.
Car à l’annonce du confinement, les Français ont fait preuve de scepticisme quant à la capacité de leur pays à produire assez pour nourrir ses habitants. Les rayons des produits de première nécessité ont été vidés en quelques heures et les petits producteurs pris d’assaut. S’était alors posée la question de l’autonomie alimentaire de la France. Notre agriculture peut-elle suffire à nous nourrir ?
Qu’est-ce que l’autonomie alimentaire ?
L’autonomie alimentaire, c’est la capacité d’un pays à subvenir aux besoins de sa population grâce à ses propres ressources.
On parle d’autonomie alimentaire lorsque la valeur marchande de ce qui a été produit sur un territoire est inférieure ou égale à la valeur marchande de ce qui a été consommé.
Généralement, lorsque l’on évoque l’autonomie alimentaire, l’idée n’est pas d’atteindre une autosuffisance, mais de renforcer la souveraineté alimentaire, c’est-à-dire privilégier une agriculture locale et indépendante pour garantir une alimentation saine et durable.
Où en est la France en matière d’autonomie alimentaire ?
Longtemps, la France était considérée comme le « grenier de l’Europe ». Aujourd’hui encore, elle est le premier pays producteur de céréales en Europe et appartient au club très fermé des superpuissances agricoles. Elle devance même l’Allemagne ou l’Italie en se positionnant sur le haut du podium européen avec un chiffre d’affaires de 72,6 milliards d’euros en 2018.
Le territoire français compte 50% de surfaces agricoles, mais ce chiffre diminue : dans les années 80, on comptait 1,2 million d’exploitations agricoles. Il n’y en a plus que 440 000 aujourd’hui. À ce chiffre, il faudra soustraire les départs en retraite massifs prévus sur les dix prochaines années. Car sur la totalité des agriculteurs encore en activité, 25% ne seront pas remplacés. À cause de tous ces facteurs, depuis les années 90, la production intérieure stagne et le taux d’importation ne cesse d’augmenter.
En d’autres termes, malgré les atouts de son territoire, l’autonomie alimentaire de la France régresse. Dans un rapport publié en 2019, le Sénat nous apprend que la France importe 20% de ses besoins alimentaires. La plupart des aliments qui se retrouvent dans l’assiette des Français ont parcouru plus de 3 000 kilomètres entre leur lieu de production et celui de consommation. Plus alarmant encore, alors que la diversité des climats permet tout type d’agriculture, la France importe la moitié des fruits et légumes consommés sur le territoire. Le beurre, le fromage, mais aussi le porc ou la volaille comptent aussi parmi les produits les plus importés.
Pourquoi importer des aliments que l’on peut cultiver localement ?
Selon un rapport du Sénat, d’ici 2023, la France pourrait même bientôt importer plus de produits qu’elle n’en exporte.
En effet, depuis quelques années, les agriculteurs français souffrent d’une concurrence impitoyable de la part d’autres pays. Ces derniers produisent à moindre coût et séduisent consommateurs, grande distribution et entreprises guidés par le pouvoir d’achat, les prix bas ou le rendement. Certaines cultures françaises ont même été totalement abandonnées faute de pouvoir faire face aux prix pratiqués au-delà des frontières. À titre d’exemple, une pomme polonaise coûtera près de 70 centimes le kilo alors qu’un kilo de pommes françaises avoisinera les 2€.
Alors que les agriculteurs français doivent se plier à d’innombrables et contraignantes normes sanitaires, de nombreux produits importés seraient, eux, non conformes selon la DGCCRF.
Pourtant, grâce à la variété climatique de notre territoire, une production locale est possible. Mais alors…
L’autonomie alimentaire est-elle possible ?
Certains produits, comme le thé, le café ou le chocolat, pourraient difficilement être produits sur nos territoires métropolitains. En se rapprochant de l’autonomie alimentaire, l’idée n’est pas de fermer totalement les frontières, mais de concentrer la production au niveau local. Si les consommateurs privilégient une alimentation locale et des denrées alimentaires vendues en direct, alors une relocalisation des activités agricoles pourrait inverser la tendance. En effet, les productions en circuits courts permettent aux agriculteurs de reprendre la main sur les prix pratiqués et de s’affranchir de certaines contraintes du marché. Côté consommateurs, cela implique évidemment une offre alimentaire plus restreinte, mais aussi plus saine, plus vertueuse et plus durable.
Enfin, il faut garder à l’esprit que si les circuits courts peuvent nous permettre de nous rapprocher de l’autonomie alimentaire tant désirée, ils ne pourront pas être les seuls acteurs pour atteindre cet objectif : il faut pouvoir produire pour tout le monde et, au niveau national, l’approvisionnement de certaines parties du territoire, notamment dans les grandes villes, peut être difficile. C’est en cela que l’agriculture française dans toute sa diversité, avec les plus petits comme les plus grands, peut être l’atout indispensable de cette course à l’autonomie.
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© Photos : Jérôme Poulalier
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