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Granvillage en reportage chez Christian Pouil – Les oliviers de la Canterrane

Dans la catégorie Une journée avec...
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Le 13 novembre 2020
Découvrez le portrait de Christian Pouil, producteur d’olives et fabricant d’huiles d’olive dans le Roussillon. En savoir plus
oliviers canterrane

Nous avons quitté Lyon direction le Roussillon pour rencontrer Christian Pouil, producteur d’olives et fabricant d’huiles d’olive. Après de longues heures de route, nous avons tout d’abord aperçu le Mont Canigou, majestueux et imposant, puis les oliviers aux couleurs d’été.

Christian Pouil granvillage


Des opportunités, des oliviers et des adieux aux poulaillers


Lorsque nous le rencontrons, Christian nous apprend que le magasin dans lequel nous nous sommes réfugiés pour échapper à la chaleur caniculaire était autrefois un poulailler de 5 000 pondeuses. Aujourd’hui, en plus de présenter les délicieux produits du terroir, il fait également office de centre de production et de dégustation.

granvillage oliviers de la canterrane

Christian est fier de nous raconter l’histoire de ce lieu sur lequel il a bâti sa carrière :

« Mes beaux-parents avaient un élevage de poules pondeuses dans les années 60. Ils ont commencé avec des poules dans des cages et vendaient les œufs aux pâtissiers et restaurateurs locaux. Ils sont passés de 5 000 poules à 10 000 poules avant d’atteindre les 30 000. Au fil des années et pour répondre à la demande toujours plus conséquente, 8 employés et 3 camions ont rejoint l’aventure. Plus de 5 millions d’œufs étaient vendus chaque année. Mais à partir de 1998, les normes européennes sont venues freiner cette ascension : les professionnels de la restauration étaient désormais sommés de ne plus utiliser d’œufs coquille pour éviter le risque de salmonelle. On leur recommandait des ovo-produits et pendant ce temps, notre production baissait de manière dramatique.

La première année après ces mesures, j’ai pensé que nous n’y survivrons pas. Dans le même temps, j’ai appris qu’une vigne se vendait à côté. Mon beau-père l’a achetée, mais nous ne pouvions rien faire d’une vigne si vieille. Nous avions 12 hectares de terrain et aucune idée de ce que nous en ferions. C’était la dernière année où l’Europe proposait une prime d’arrachage pour les vignes. Au même moment, afin de relancer l’oléiculture sur le continent européen, une prime de plantation était octroyée. Je suis allé voir un ami pépiniériste. Nous avons parlé oliviers et j’ai été immédiatement séduit. La France ne produisait que 4% de notre consommation. Le reste venait de l’étranger. Alors on s’est dit qu’il y avait là un potentiel »

oliviers de la Canterrane

Et voilà, la machine était lancée. Alors que l’économie de son entreprise vacillait, Christian a su rebondir pour se réinventer. Il avait appris que les anciens plantaient les oliviers à sept mètres les uns des autres. Il ne savait pas encore pourquoi, mais son instinct lui a dicté de suivre ces enseignements. Après avoir arrêté son choix sur deux variétés d’olive, l’olivère et la verdale, 2 400 boutures d’oliviers ont été préparées. 2 000 pour la première et 400 pour la seconde. L’ami pépiniériste les a plantés en 1998, mais Christian ne les a reçus qu’en 2002. Il leur faudra ensuite huit ans pour vendre leur première huile d’olive.




Christian le sait, ils ont été nombreux à le penser fou. Mais le jeu en valait la chandelle. Grâce aux primes d’arrachage et de plantation, il a pu débuter sa nouvelle activité sans débourser un centime. En 2010, l’un des poulaillers est transformé en magasin. En 2011, de nouvelles normes sonnent le glas pour le deuxième poulailler et en 2012, le dernier est fermé à son tour.

Les années passant, Christian apprend à connaître ses oliviers :

« C’est en plantant que j’ai compris que les anciens avaient planté leurs oliviers à sept mètres d’écart. L’olivier n’est pas auto-pollinisateur. C’est le vent qui distribue le pollen, pas les abeilles. Il faut que l’espace entre les arbres soit assez large pour que le pollen circule. Ceux qui ont planté leurs arbres très serrés pour avoir plus d’olives en ont finalement moins que moi. »

chistian pouil oliviers

Alors que le succès est au rendez-vous, Christian préfère rester avec ses douze hectares. Cela lui permet de prendre soin de ses arbres et de proposer des produits finis de qualité. Mais pour un producteur d’olives, 12 hectares ne suffisent pas à assurer la rentabilité d’une exploitation. Pour préserver son autonomie, Christian a décidé d’ouvrir un magasin au sein-même de la plantation :

« Pour qu’une plantation soit rentable, il ne faut faire que de la vente directe. Si vous passez par un intermédiaire, c’est terminé. Chez nous, tout est en vente directe, au magasin et sur internet. On est partout pour toucher toutes les générations. »

produits du terroir oliviers de la canterrane

Au magasin, Christian et sa famille proposent leurs huiles d’olive natures ou aromatisées, les sels aromatisés qu’ils préparent eux-mêmes, les confitures préparées par Thérèse, son épouse et des produits des producteurs aux alentours.

Concernant sa production, Christian la qualifie de « raisonnée ». Il nous avoue ne pas croire à la bio. Ou plutôt à l’idée que tout le monde se fait de la bio.

« Je ne crois pas à la bio, mais je ne suis pas anti-bio. Je pense qu’il y a certaines choses qui ne peuvent pas se faire en bio. Le cahier des charges me semble trop léger. Le glyphosate est un désherbant, toxique, cancérigène. Prenons l’exemple de quelqu’un qui aurait des vignes depuis 70 ans. Durant sept décennies, ses vignes auront reçu du glyphosate. Cette personne souhaite se convertir à la bio. Durant trois ans, elle ne met plus de glyphosate. La quatrième année, son vin est bio. Comment peut-on croire qu’en trois ans seulement, cette terre ne contient plus aucune trace de glyphosate ? »


« Le vrai métier de l’oléiculteur c’est le palais« 


Le vrai métier de l’oléiculteur, c’est le palais. C’est ce que nous confie Christian. Lui, ce qu’il aime, c’est construire ses huiles :

« On s’adapte à ce que veulent les gens. Au début du cycle, les olives sont très vertes : il y a 90% d’olives vertes et 10% de rouges et au fur et à mesure que la cueillette avance, le vert diminue et le rouge augmente. Puis le noir arrive. Avec la même variété d’olives, vous pouvez avoir une vingtaine de goûts différents. Chaque goût correspond à une maturité de deux à trois jours. En vulgarisant, je pourrais dire que les olives vertes sont là pour les antioxydants, les rouges pour la partie aromatique et les noires pour la douceur. La cuve idéale comporterait un tiers de chaque. Ces cuves-là représentent peut-être un volume de deux cuves sur vingt-cinq. Ce sont les cuves que nous allons garder pour la fin de l’année.

Ensuite, avec mon fils nous allons nous enfermer et goûter un échantillon de chaque cuve. Nous échangeons, essayons de tomber d’accord et commençons les assemblages pour tenter de nous rapprocher du goût des deux premières cuves. Comme une même huile doit avoir le même goût tout au long de l’année, nous recommençons régulièrement ce processus. C’est ça faire de l’huile. »

huiles d'olive christian pouil

Durant quelques années, Christian s’est occupé d’un syndicat AOC pour relancer l’oléiculture dans le Roussillon. Mais après avoir reçu le premier cahier des charges, il démissionne. Sa conception de l’oléiculture était bien trop éloignée de la leur, trop aseptisée à son goût. Avec l’AOC, toutes les huiles du département auraient eu le même goût. Pour le producteur, c’est la diversité des arômes qui fait la richesse d’un terroir.

Christian fait confiance à ses produits. Les AOC, les médailles et les labels lui importent peu. Pour lui, cela ne sert qu’à jeter de la poudre aux yeux. Pour attester qu’une huile est bonne, rien ne vaudra jamais les mots d’un client satisfait.

« À une époque, je faisais des concours. J’ai gagné vingt-huit médailles et j’ai été sélectionné quatre ans consécutifs parmi les 100 meilleures huiles mondiales. J’ai obtenu la médaille d’or mondiale de l’huile d’olive deux ans d’affilée. Pourtant, aujourd’hui, tout ça n’a plus de valeur pour moi. Je fais de la vente directe et mes clients, médaille ou pas, ils s’en fichent comme de l’an 40.

J’ai déjà fait partie d’un jury. On nous disait qu’il fallait attribuer une médaille d’or alors que les huiles présentées étaient rances ou mauvaises. Un membre du jury buvait son café durant la dégustation. J’ai compris que ceux qui jugeaient ne connaissaient pas les produits présentés, que les producteurs se donnaient tout ce mal pour pas grand-chose. Les concours sont payants et peu accessibles pour bon nombre d’agriculteurs. Les seules médailles ce sont les gros moulins. Je me fiche de mettre 3 000 euros pour avoir une médaille décernée par des gens qui ne connaissent rien. La meilleure clientèle, ce n’est pas une médaille d’or, c’est le bouche-à-oreille. Les gens feraient mieux d’aller voir les producteurs en direct pour discuter plutôt que de se fier aux étiquettes. Je le dis souvent, la force du commerce n’est pas de vendre, mais de revendre. Si on fait de la qualité, les clients reviennent. Dans le monde agricole, il faut savoir semer pour récolter. Il faut que les gens aient confiance. »

Nous avons terminé la journée avec Christian, dans ses oliveraies, face au Pic du Canigou.

Oliviers Mont Canigou

« Même quand c’est dur, c’est toujours agréable de travailler ici. Même en hiver. Même seul. Je regarde le Canigou et je me sens bien ».



Vous avez aimé le portrait de Christian ? Découvrez celui de Laurent, Steve et tous les autres sur notre blog.

Retrouvez les huiles d’olive des Oliviers de la Canterrane :
www.lesoliviersdelacanterrane.com
Ferme de la Canterrane 66300 Trouillas


© Photos : Jérôme Poulalier
Découvrez son univers 

2 commentaires sur “Granvillage en reportage chez Christian Pouil – Les oliviers de la Canterrane

  1. J’ai beaucoup apprécié ce reportage qui est on ne peut plus prés de la réalité.
    Bravo Christian continue comme ça, tu es dans le vrai.
    Et j’ai appris des choses
    Et merci à ceux qui l’on réalisé c’était top.

    1. Bonjour Georges
      Merci beaucoup pour ce joli commentaire ! C’est toujours un plaisir de mettre en lumière le travail et le savoir-faire de nos producteurs locaux. Si cet article vous a plus, restez dans les parages, de nombreux autres sont à venir. Et n’oubliez pas de partager 😉
      L’équipe granvillage

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