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Christophe Valaz, ramasseur-cueilleur de plantes aux Jardins d’Amélie Blanche

Dans la catégorie Une journée avec...
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Le 22 avril 2021
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cueilleur

Pour granvillage en reportage, nous sommes allés au cœur de la Savoie, à la rencontre de Christophe Valaz, élu Groupama, mais surtout ramasseur-cueilleur. Il connaît les mille et un secrets des plantes et son pays dans les moindres recoins. Il nous raconte ce qui l’a mené jusqu’ici.  


Avec Christophe Valaz, dans l’intimité des plantes des jardins d’Amélie Blanche 


Rencontrer Christophe & Églantine, c’est pénétrer dans un monde où l’humain et la nature ne font qu’un. En un coup d’œil, ils reconnaissent entre mille les plantes qui font du bien. Entre leurs mains, elles deviennent des infusions qui soignent, apaisent et soulagent. À votre tour, suivez-nous dans les jardins d’Amélie Blanche, sur les pas d’un paysan-cueilleur.  

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jardins d'amélie blanche

Christophe est un ramasseur-cueilleur. Il repère puis ramasse les plantes pour les transformer en infusions qui guérissent le corps et l’esprit. Il sait ce qu’il doit à la terre. Il accepte ses offrandes, mais veille toujours à ne pas la blesser, à ne pas laisser la « trace de l’Homme » qui peut être si néfaste. Il s’est fait à ce nouveau métier de paysan-cueilleur, comme on endosse un costume sur mesure. 

« J’ai été licencié au début de l’année 2009. Jusqu’alors, j’étais en mécanique générale, dans l’industrie. Suite à ça, il fallait que je trouve comment rebondir. Je me suis dit que la vie me faisait un signe. J’étais célibataire, sans enfant, je n’avais pas d’emprunt. Rien ne rendait ce licenciement plus difficile que ce qu’il n’était. D’ailleurs, je dis souvent que mon licenciement est ma plus belle promotion. Mon chemin était tracé, mais la vie m’a dit « Eh non, ce n’est pas comme ça que ça va se passer ».  
Je suis donc reparti de zéro. Il y a eu de longues réflexions. Et puis, au fil du temps, j’ai nourri mon projet. Je me suis lancé dans une formation pour devenir Responsable d’Entreprise Agricole. Grâce à la théorie, mais aussi aux rencontres, aux expériences, mon objectif s’est peu à peu dessiné. J’ai enchaîné avec une spécialisation plantes médicinales et aromatiques. Je suis alors devenu paysan-cueilleur.
Je pensais connaître mon territoire, mais mon métier m’a amené à le concevoir autrement. Avant ça, je restais sur les grands chemins. Les plantes m’ont amené sur les petits sentiers. Je suis un gars du coin. J’ai bougé, mais mes racines sont toujours restées ici ».  

paysan cueilleur

Christophe a eu du nez en devenant paysan-cueilleur. Depuis quelques années, il sent un regain d’intérêt pour leurs vertus : 

« On remarque un certain rajeunissement du côté des consommateurs. J’ai parmi mes clients des hommes et des femmes de moins de 30 ans, intéressés par les plantes, par les tisanes. Les regards changent. On sent comme une ouverture. Certains, lorsqu’ils reviennent me voir m’avouent qu’ils ont décidé de ne plus tondre leur pelouse pour voir ce qu’ils peuvent récupérer dans leur jardin. Depuis quelque temps, il y a un véritable désir d’autonomie. C’est un peu un retour aux sources. Car ces savoirs sont reconnus depuis la nuit des temps. 
Les apothicaires étaient les premiers pharmaciens. Ils avaient une approche tournée vers les plantes. L’évolution de la chimie et la découverte des principes actifs ont permis de reconnaître le pouvoir des végétaux. Ensuite, il y a eu les premiers essais de synthétisation et on s’est peu à peu éloigné de l’aspect brut de la plante. On a un peu perdu cette médecine naturelle et tout ce que l’on avait acquis au fil des siècles. On ne peut rien y faire, c’est ainsi qu’évolue la société. Je dis souvent que le tournant est venu avec ce que j’appelle « la génération formica ». Avec l’industrialisation, ils ont jeté tout l’héritage reçu des anciens. On a commencé à vivre dans une société goudronnée, hyper industrialisée. La transmission a été rompue. 
Puis, il y a eu l’épidémie. Elle a vraiment changé notre rapport à la nature. Les consommateurs ont ressenti le besoin de prendre soin d’eux autrement. Pour certains, ça leur a ouvert les écoutilles. Pour d’autres, ça les a complètement refermées et ça a réveillé des peurs.
Des gens m’ont dit que je faisais le métier qu’ils avaient toujours rêvé de faire. C’est beau d’entendre ça. Pour ma part, j’ai ressenti un réel élan de solidarité. Par plusieurs fois, des personnes sont venues sur mon stand « On n’y connaît pas grand-chose, mais on veut vous aider ». C’est gratifiant et rassurant. Cette période m’a incité à imaginer d’autres choses. Nous avons mis en place des sorties pour apprendre à des petits groupes à reconnaître et cueillir les plantes. Grâce à ça, j’ai pu me réinventer tout en m’inscrivant dans une démarche de transmission. En tant que paysan-cueilleur, je contribue à rendre ces savoirs accessibles. Parfois, à la fin, on me remercie du temps passé à discuter. Mais moi je réponds que je suis là pour ça ». 

plantes

Même s’il a particulièrement apprécié le silence et les routes désertes lors du confinement, Christophe aime être auprès de celles et ceux qui estiment ses plantes. Il souhaiterait d’ailleurs que cette passion soit davantage partagée : 

« Intéressezvous à ce qu’il se passe autour de chez vous. Allez au contact des producteurs. Prenez ce temps pour échanger, comprendre leur quotidien et leurs difficultés. Allez voir comment ça se passeC’est vital ».  
 

Les consommateurs fidèles sont au rendez-vous, mais Christophe le sait, pour certains agriculteurs, les quotidiens sont encore bien difficiles  

« En supermarché ou chez votre producteur, si vous avez le sentiment que votre produit ne vous coûte pas cher, alors demandez-vous si la personne à l’autre bout de la chaîne est bien rémunérée. L’agriculture devrait être une activité nourricière, rémunératrice pour ceux qui la font. C’est loin d’être toujours le cas. Sans les subventions, beaucoup d’agriculteurs ne pourraient pas se rémunérer. Aujourd’hui, moi j’en vis chichement. C’est un choix de vie. Je n’ai pas des chiffres d’affaires exorbitants, mais je n’échangerais ma place pour rien au monde. » 

christophe valaz

Pour ne pas mettre tous ses œufs (ou ses plantes) dans le même panier, Christophe vend ses herbes pour tisanes aux particuliers, en ligne, chez lui ou sur les marchés, mais aussi à des magasins de producteurs ou des professionnels de la gastronomie.  

« Je travaille en collaboration avec certains producteurs du coin. Parfois, des gens viennent jusqu’à moi grâce aux recommandations d’anciens clients. Je vends une partie de ma production à des restaurants gastronomique, mais la plus grosse partie est vendue aux particuliers dans des magasins de producteurs ou sur les marchés. Covid oblige, j’ai fait un peu moins de marchés cette année. Certains clients arrivent avec des demandes ultra-spécifiques. Je leur dis « les plantes ne poussent pas dans les cartons ». C’est important qu’ils comprennent qu’avec la nature, ce n’est pas l’Homme qui décide et qu’il y a des règles à respecter. Il m’est déjà arrivé de dire non à une cliente qui voulait m’acheter de la mauve, très difficile à cueillir, pour la mettre dans un pot-pourri, car elle trouvait ça joli.  
En revanche, travailler avec les restaurateurs m’a ouvert de nouvelles portes. Ils apprennent avec moi et j’apprends avec eux. Ils écoutent ce que j’ai à raconter, j’entends leur expertise » 

Si la cueillette est encadrée par la loi, elle répond surtout à des règles bien plus grandes. Car au-delà du cadre juridique, c’est la nature qui règne en maître.  

« J’essaie de ne pas retourner aux mêmes endroits d’une année à l’autre. Cela me permet de faire des rotations et de ne pas fragiliser la plante. Ce serait dangereux pour elle, mais cela reviendrait aussi à me tirer une balle dans le pied. Une plante est à un endroit pour différentes raisons. Alors, on regarde tout : l’exposition, la terre, l’humidité… et après, on fait à l’instinct. On se laisse aller et on se fie à son intuition. On s’écoute puis on arrive à un endroit jusqu’alors inconnu. Et là, on se dit « wahou ».  
Lorsque l’on cueille, il faut être conscient de ce que ça implique pour la plante. Elle a donné de son énergie pour pousser. Son but, c’est de se développer pour se reproduire. Alors, pour la préserver, on la cueille en début de floraison. Ça permet de recueillir le principe actif qui est concentré lorsque la plante est encore en bouton. Sur une plante, on peut cueillir les feuilles, la fleur ou les racines. Les feuilles, ce sera après le bourgeon à la fin du printemps. La fleur ça va être début d’été. La montée de sève va venir nourrir la plante et la concentration se fait dans les parties les plus extrêmes. À l’automne, cette énergie redescend dans la racine et c’est ce que l’on va cueillir à ce moment-là.  
Mon métier, ce n’est pas comme de l’élevage où il y a des heures fixes pour chaque tâche. Pour moi, il n’y a pas l’heure de la traite et l’heure de la sortie. Je me lève le matin, je regarde le ciel et je me dis « allez, j’y vais ».  
Il y a deux types de moments : les moments où je suis tout seul en cueillette dans les bois. Et là, il y a comme une extase dans tout ce silence. Et les autres moments, où je partage avec vous, avec les gens, où je suis dans l’échange. Pour les uns comme pour les autres, c’est très intense. » 

christophe cueilleur

Longtemps, Christophe s’en allait seul sur les sentiers. Aujourd’hui, ils sont deux dans l’aventure : 

« J’étais un loup solitaire avant Églantine. J’ai fait mon petit bonhomme de chemin tout seul. Et puis, Églantine est venue et on s’est mutuellement nourris nos expériencesOn veut porter un projet à deux. Ce n’est pas une difficulté, c’est une nouvelle étape. » 

Si la découverte du quotidien de Christophe vous a donné envie de vous lancer, sachez qu’on ne s’improvise pas ramasseur-cueilleur ou ramasseuse-cueilleuse. D’ailleurs, Christophe & Églantine ont un dernier conseil pour vous : 

« Ne consommez que ce que vous arrivez à identifier. Protégezvous. Certaines plantes sont toxiquesTenez-vous en aux plantes que vous reconnaissez avec certitude. Commencez par cueillir des pissenlits, des orties, puis au fil de vos connaissances, ouvrez vos recherches. » 

Nous voilà prêts à quitter Christophe et Églantine. Mais avant les adieux, il nous fallait résoudre un dernier mystère : qui est cette insaisissable Amélie Blanche qui n’a pas daigné nous honorer de sa présence ? 

christophe & églantine


« Les tisanes de Christophe ce n’était pas très vendeur. Alors, j’ai commencé à griffonner, j’ai cherché. Je me creusais la tête, puis ça m’est finalement apparu comme ça, tout naturellement. Amélie et Blanche sont les prénoms de mes grands-mères. Ce sont elles qui m’ont initié. Le jour où j’ai trouvé ce nom, j’ai eu un peu comme une illumination. J’ai su que c’était le bon. Et puis, je suis persuadé qu’elles veillent encore sur moi. »   


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Photos : Thomas Spault.

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