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La bergerie Urbaine – Des moutons dans la ville

Dans la catégorie Une journée avec...
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Le 21 juillet 2020
Bitume & pâturage En savoir plus
moutons

Vous avez vu passer des moutons dans les rues de Lyon ? Ne vous pincez pas, vous ne rêvez pas. Ce sont les moutons de la Bergerie Urbaine qui pâturent sur les trottoirs de la capitale des gones ! Bastien, qui est à l’origine du projet, a répondu à nos questions sur ses moutons citadins. Mais il tient à le préciser, la Bergerie Urbaine, c’est avant tout une aventure qui se vit à plusieurs !


Revenons-en à nous moutons de ville

Bonjour Bastien, on a entendu dire que des moutons se baladaient au cœur de la ville, peux-tu nous en dire plus ?

Bonjour, je m’appelle Bastien, j’ai 33 ans et je suis berger urbain ! Avec la Bergerie Urbaine, nous faisons pâturer des moutons en ville. C’est une forme d’agriculture urbaine car nous élevons des animaux de haute qualité environnementale, nourris uniquement à l’herbe, en plein air et avec des agneaux qui restent sous leur mère.

Nous avons une activité multifonctionnelle car elle est également portée sur d’autres enjeux qui nous tiennent à cœur : nous déplaçons nos moutons à pied, en ville, sur les voies vertes, les trottoirs, les passages piétons. Sur leur passage, les moutons créent des ambiances totalement atypiques : on voit des gens intrigués à leur fenêtres qui finissent par descendre, nous rencontrer. Ils discutent entre eux et avec nous. Ça crée du lien social. Avec nous, les discussions tournent beaucoup autour de l’écologie, la consommation, la biodiversité, l’alimentation et la discussion prend alors la forme de sensibilisation environnementale.

Le troisième enjeu est environnemental : le passage des moutons en ville crée de la biodiversité. Leurs excréments sont un trésor de biodiversité car ils vont eux-mêmes attirer les insectes et enrichir la chaîne alimentaire. Alors oui, ça peut paraître étrange de parler d’excréments en tant que trésors, mais c’est vraiment le cas !
Pour résumer, la Bergerie Urbaine, c’est de l’agriculture urbaine extensive, mais aussi un levier social et environnemental.

Le fonctionnement de l’association est hybride : nous avons une équipe de permanents qui gèrent les tâches de fond de la bergerie, la gestion de troupeau, l’administratif, la gestion des partenariats, des prospections, des commercialisations et de l’autre côté, nous avons une vingtaine de bénévoles. Ces bénévoles sont rémunérés à la proportion de leur investissement. Nous ne leur donnons pas des kilos euros, mais des kilos de viande ! Chaque bénévole, en fonction de son pourcentage d’investissement sur l’année, obtient un colis de viande à la fin de l’année. Il y a deux intérêts : permettre à n’importe qui d’accéder à de la viande de haute-qualité environnementale en échange de quelques tâches et reconnecter villes et campagnes grâce à la réappropriation d’un savoir qui s’est un peu perdu, l’élevage. Aujourd’hui, peu de personnes connaissent le rythme des animaux, ce qu’ils mangent, comment ils vivent… les bénévoles peuvent renouer avec tout ça.
La Bergerie Urbaine, c’est comme un jardin potager, mais avec des moutons. C’est de l’agriculture collaborative. Sauf qu’au lieu de récolter des tomates et courgettes, on récolte de la laine et de la viande.

moutons dans la ville


Des bergers urbains, c’est peu commun. Comment est née l’idée ?

J’ai vu des bergers urbains à Paris. Je les ai rencontrés et lorsque j’ai compris la multiplicité des effets que les moutons avaient sur la ville et les habitants, j’ai directement été convaincu.

Il faut vraiment voir l’effet que provoque un passage de moutons en ville ! Ces animaux ont un capital sympathie très puissant. Alors que la ville peut parfois être un peu grise, un peu morose, nous avons avec nous une véritable fabrique à sourires. Pour nous aussi, c’est très agréable : on apporte avec nous des avalanches de sourires, on est en ville comme à la campagne, on côtoie des animaux d’élevage



Comment ce sont passés vos premiers pas en tant que bergers et les premiers pas de vos moutons sur le bitume ?

Dans un premier temps, j’ai fait un tour de France des structures d’agriculture urbaine dans ce domaine-là. J’ai ensuite réuni un certain nombre de personnes autour de moi, puis on s’est lancés ! Nous avons fait les démarches pour créer la structure et nous nous sommes mis en quête d’un site pour héberger la bergerie. Nous avons obtenu les moutons et le matériel. Il nous a ensuite fallu les domestiquer. Nous avons des moutons d’élite ! Nous avons mis en place un parcours de domestication, leur avons montré que la ville c’est super chouette si tu restes sur le trottoir, on les a habitués aux poussettes, aux vélos, aux trottinettes, aux berges et à tous les éléments qu’ils ne connaissaient pas. Tout ça nous a demandé plusieurs mois d’exercice. D’ailleurs, les moutons ne nous suivent pas sans raison. Ils ont bien compris qu’il y avait un intérêt. Ils savent que quand ils nous suivent, c’est comme s’ils entraient dans le rayon sucreries d’un grand magasin. Ils peuvent manger çà et là les choses qu’ils préfèrent. Ils aiment aussi les contacts avec les humains. Car les contacts avec les humains, ce sont les caresses et les caresses permettent… de se gratter et d’enlever toutes les petites choses coincées dans la laine !

moutons biodiversité


En parlant de laine, que faites-vous de celle de vos moutons de ville ?

On commence tout juste un processus de valorisation, mais il faut savoir que c’est très compliqué. En France, la filière de la laine n’existe plus. Elle a été supprimée, délocalisée. Pourtant, la laine est une matière exceptionnelle. C’est une formidable alternative au pétrole. On peut faire énormément de choses avec. Le travail de la laine est assez important : il faut la récolter, la laver, la sécher, la carder (démêler la laine), la feutrer, la filer… c’est tout un ensemble d’opérations qui demande aussi des machines !
Nous avons profité du confinement durant lequel nous n’avions pas le droit de sortir nos animaux pour éviter les attroupements publics, pour investir dans le high-tech des années 30 : un banc à carder ! C’est une petite machine en bois avec un balancier qui permet de carder la laine pour lui donner du volume. Nous avons produit nos premiers coussins de méditation qui sont désormais en vente sur notre boutique en ligne.



Quand on est berger urbain, quels sont les grands moments de l’année ?

Tous les jours ! Les activités varient beaucoup en fonction des saisons. Au printemps, c’est l’opulence, il y a de l’herbe de partout. En été c’est plus compliqué, l’herbe sèche et est difficile à trouver. En hiver, il n’y a plus d’herbe mais il y a les agnelages, c’est-à-dire les naissances. La vie semble renaître quand la nature est éteinte ! Chaque période a ses bons et ses mauvais moments et elles sont toutes aussi intenses.

agnelage


À quoi ressemble journée type d’un berger urbain ?

Il n’y en a pas ! Ça va dépendre de ce qui va nous tomber sur la tête. Il y a des bases : nos animaux ont besoin d’herbe, besoin d’être déplacés et abreuvés. Après, il peut y avoir plein d’aléas, liés à la météo par exemple. Il y a ensuite toute la partie administratif, communication, prospection à assurer. Généralement, nous sommes sur du 50-50.



À quoi ressemble la vie d’un mouton de la Bergerie Urbaine ?

Pour l’instant, nous aimerions avoir 60 animaux. Une fois cet objectif atteint, nous verrons si nous restons à ce chiffre, si nous en voulons plus ou moins.
Les moutons, c’est une société matriarcale. Généralement, nous gardons les femelles pour la reproduction et ce sont les mâles qui seront consommés. Les mères vont rester jusqu’à leur belle mort à la bergerie. Dans notre système d’élevage, nous essayons de garder nos animaux le plus longtemps possible. Nous gardons les mâles durant près d’un an, ce qui est près de 3 ou 4 fois supérieur à un élevage conventionnel. Nous avons des animaux élevés uniquement à l’herbe. Ils n’auront donc pas ce goût rance qu’on peut retrouver dans des élevages intensifs. Nos agneaux seront beaucoup plus gros et pourront vivre plus longtemps dans de belles conditions.

Nous ne nous servons pas encore du lait de nos femelles. Pour pouvoir faire des produits laitiers, il faut retirer du lait aux agneaux. Donc c’est soit on mange les agneaux pour avoir du lait, soit on partage avec eux. Pour l’instant, nous préférons rester uniquement sur la viande car la production de lait est très complexe. Nous voulons en laisser pour les agneaux et l’idée, de notre côté, n’est pas de les manger si tôt. Si nous devons le faire, nous le ferons de manière artisanale, juste pour se faire plaisir avec un petit peu de lait.



On doit en vivre de belles choses avec ces moutons. Peux-tu nous parler d’un souvenir fort à la Bergerie Urbaine ?

Nous sommes au quotidien avec les animaux et avons développé avec eux un lien très fort. Ce que j’aime tout particulièrement, c’est l’effet qu’ils ont sur les habitants. C’est tout le temps surprenant d’arriver dans un quartier avec un troupeau de mouton. On a toujours quelques enfants qui nous suivent tout le long et qui vont passer la journée avec des étoiles dans les yeux. Récemment, une enfant me dit en partant « Monsieur, quand je serai grande, je voudrai être bergère ». Cette phrase est craquante et très mignonne. On s’attend plus à ce qu’un enfant nous dise qu’il veut faire du rap ou être youtubeur, alors c’est surprenant. Hier, un jeune ado nous a lui aussi suivi toute la journée. Et j’aime l’idée de me dire que peut-être, grâce à nous, il s’orientera vers un métier plus vert, peut-être lié à l’agriculture. Il y a vraiment ces petits moments à part dans notre activité.

mouton et enfants


Vous souhaitez en savoir plus sur la Bergerie Urbaine ? C’est par ici !
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Merci à Bastien et son équipe pour le temps accordé.

Et vous, que pensez-vous de l’agriculture urbaine ? Des projets innovants sont nés dans votre ville ? Vous avez des idées pour relier villes et campagnes ? Vous aimeriez que le concept se développe jusque chez vous ? Dites-nous tout en commentaire ou sur Facebook & Instagram.

moutons en ville

Photos aimablement transmises par la Bergerie Urbaine

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