granvillage en reportage – La ferme de Bénédicte Fournié
Pour granvillage en reportage, nous sommes allés dans l’Ariège, là où s’érigent les belles montagnes du Sud-Ouest, à la rencontre de Bénédicte, de ses vaches, ses chevaux, ses porcs et ses brebis. Ici, l’élevage, c’est une passion qui se vit en famille. Bénédicte nous raconte tout, d’un coup de fil qui a changé sa vie, à ses combats d’aujourd’hui pour faire parler l’agriculture au-delà des clichés.
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Le GAEC de la Coumes, Bénédicte, ses vaches, ses chevaux, ses porcs et ses brebis
Pour Bénédicte, l’élevage, c’est une histoire qui se vit en famille. Pourtant, le chemin n’était pas tracé. Avec un grand-père cheminot et un père contrôleur, on l’attendait davantage sur les rails que dans les champs. Mais que voulez-vous, l’agriculture a quelque chose de magnétique pour qui est touché par la passion. C’est ainsi que le bac en poche, Bénédicte s’oriente vers un DUT en biologie option agronomie et réalise ses stages dans des entreprises agroalimentaires. Une fois son diplôme obtenu, elle se met à la recherche d’un travail. Elle a envie de quitter sa Nièvre natale, de voir du pays. Un jour, le téléphone sonne. On lui propose un poste de technicienne agricole dans une association qui aide les éleveurs à bénéficier d’aides diverses, dans l’Ariège. Elle regarde les magnets des régions qui ornent son frigo. Elle a déjà une petite famille, mais quand la bonne étoile frappe, on ne réfléchit pas deux fois. Les voilà partis à 700 kilomètres de chez eux pour un nouveau départ.
Avec le temps, il y a ce qui fait le quotidien d’une vie de famille : un deuxième enfant, un divorce, un autre nouveau départ. En 2007, Bénédicte se lance pour de bon dans l’agriculture.
« En 2012, je rejoins le GAEC familial. Mon fils Marius y entre à son tour en 2017. Nous serons bientôt cinq dans ce groupement créé en 2004.
L’année prochaine, nous allons restructurer l’exploitation pour diminuer le nombre d’animaux et nous concentrer sur l’essentiel : le produit fini. En effet, on valorise mieux un produit transformé qu’un produit brut. La demande est au rendez-vous, il ne nous reste plus qu’à produire ! Côté élevage, ça ne changera pas grand-chose. La transformation demande beaucoup de travail et une certaine expertise. C’est pour cette raison que nous avons choisi de ne transformer que de la viande et de ne pas nous orienter vers un élevage laitier en plus de ce que nous avons déjà. Nous ne pouvions pas faire lait et viande et l’investissement viande était moins lourd que pour le lait. »
Malgré les changements qui se profilent sur l’exploitation, Bénédicte connaît sa routine sur le bout des doigts. Même si, quand on est agricultrice, la routine est faite d’imprévus.
« Le matin, je me rends auprès de mes animaux. Je
vais nourrir certains agneaux au biberon et vais voir si tout va bien. S’ils
sont petits, j’y retourne aussi le soir. L’été, les moutons sont en
estive : c’est un berger qui prend la relève. Nous allons le voir toutes
les deux semaines pour l’aider à faire les soins et voir si tout se passe bien.
Cela me permet d’avoir plus de temps pour m’occuper de l’administratif ou faire
de la transformation avec mon fils, par exemple. C’est difficile de décrire une
journée type, car toutes nos journées se ressemblent jusqu’à ce qu’elles ne se
ressemblent plus. Comme quand un petit agneau s’échappe et qu’il faut le
retrouver, puis le rattraper !
En fait, nous sommes auprès de nos animaux la majeure partie du temps et le
reste, nous faisons les petites choses indispensables au bon fonctionnement de
l’exploitation : réparation des clôtures, vérification du matériel
agricole, nettoyage de la salle de découpe… »
Lorsqu’elle n’est pas au four et au moulin, dans l’atelier ou auprès des bêtes, Bénédicte est au contact de ses clients. Pour elle, les circuits courts sont indispensables pour comprendre sa clientèle et être comprise également. Elle les accueille sur son exploitation, mais va aussi les rencontrer lors d’événements, comme le Salon International de l’Agriculture.
« Venir sur l’exploitation pour faire leurs achats peut permettre aux gens de voir comment nous travaillons. Ici, nous n’avons rien à cacher. Nous n’avons pas de label, mais nous fabriquons nos produits en respectant les animaux et les consommateurs.
Les labels sont intéressants quand on travaille pour l’exportation mais aussi pour les exploitants qui vendent à des intermédiaires comme les centrales d’achat ou les coopératives.
Ça donne une garantie supplémentaire aux consommateurs, même si certains producteurs ne font ça que pour bénéficier des aides et redorer leur image. Mais ce n’est pas la cas de la majorité des agriculteurs, ni le nôtre.
Nous, nous vendons principalement aux gens du coin. Nous vendons aussi nos produits à quelques restaurateurs, mais c’est plus compliqué : souvent ils ne veulent qu’une partie et ne sont pas intéressés par le reste de la carcasse.
Pour garder le contact avec notre clientèle durant le confinement, nous avons mis en place un drive fermier. Cela nous a permis de booster nos ventes. En temps normal, nous vendions pour 1 000 € de produits par semaine. Durant le premier confinement, nous faisions 1 000 € rien qu’avec le drive. Les gens se déplaçaient, il y a eu un véritable engouement pour les produits locaux. Il y avait la queue devant le drive ! Depuis, ça s’est atténué. Mais nous espérons que certains clients prendront le pli et continueront à venir nous voir. »
S’ils permettent de garder le lien, les circuits courts sont aussi un moyen de lutter contre l’agribashing et faire passer des messages aux consommateurs comme aux décideurs.
« Nous sommes les premiers maillons de la chaîne alimentaire. On tape régulièrement sur les agriculteurs, mais sans nous, que mangeriez-vous ? On casse du sucre sur nos élevages, mais il faut savoir que nous élevons pour nourrir la population. Ce n’est pas par plaisir que nous emmenons nos animaux à l’abattage. Effectivement, il y a des élevages intensifs. Mais s’ils sont ici, c’est parce qu’à un moment, il y a eu une demande. Il fallait produire plus et les technologies se sont développées au détriment de l’animal. Là, on nous demande de faire marche arrière, de considérer l’animal et c’est très bien. Mais il ne faut pas aller vers un autre extrême non plus.
Nous élevons du mieux que nous pouvons. Lorsque l’une de nos bêtes ne va pas bien, nous la soignons ou appelons un vétérinaire. Elles sont dans le pré toute journée durant l’été et ont une litière de paille l’hiver pour les tenir au chaud. Elles ont à manger matin et soir. Nous faisons en sorte de leur offrir le meilleur environnement possible.
Il faut que les consommateurs viennent discuter avec nous, nous faire part de leurs interrogations. Il faut qu’ils le disent quand ils voient quelque chose qui ne leur va pas. Nous pourrons échanger, apporter des réponses, des explications. Car le plus important, avant de s’indigner, c’est d’essayer de comprendre.
L’agriculture a une histoire. C’est important de la connaître pour savoir ce qui nous a amenés ici aujourd’hui. Si vous voyez un tracteur épandre des produits dans un champ, ne criez pas tout de suite au scandale. Allez le voir, posez-lui vos questions. Car ce ne sera pas forcément des produits chimiques. Et si c’est le cas, il y aura certainement une explication.
Même du côté des agriculteurs, il y a un travail à faire. Nous devons faire preuve de pédagogie. Il faudrait que l’on puisse nous entendre au-delà des clichés. Les agriculteurs communiquent peu sur leur métier et c’est pourtant indispensable. Tout ce que nous faisons dans nos champs ou nos élevages est fait pour une raison. Nous ne voulons pas faire de mal à nos animaux ou à la nature. Bien au contraire. »
Le portrait de Bénédicte, éleveuse de vaches, chevaux, porcs et brebis, vous a plu ? Découvrez tous les portraits granvillage et suivez-nous sur Facebook & Instagram pour ne pas rater les prochains !
© Photos : Jérôme Poulalier
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